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Les Fils de l'homme | plan-séquence 2 (2006)
Réalisation : Alfonso Cuarón
Objectif du plan séquence :
Plonger le spectateur au cœur de l’action
Immersion totale : En supprimant le montage classique, le plan-séquence donne l’impression au spectateur d’être pris dans l’événement, à la manière d’un témoin ou d’un journaliste embedded.
Effet de réalité brute : Ce procédé renforce l’aspect quasi-documentaire du film, donnant un sentiment de chaos authentique.
Élever la tension dramatique
Le choix du plan séquence accentue la montée en tension, sans possibilité de répit. Il reflète le flux ininterrompu de la violence dans cette société dystopique.
La caméra suit Theo (Clive Owen) dans les ruines d’un bâtiment, à travers explosions, tirs croisés, cris, et morts soudaines. On vit l’instant avec lui, sans distanciation.
Illustrer le désespoir et l’humanité dans la guerre
Dans cette scène, Theo progresse dans un bâtiment pour rejoindre Kee et son bébé, dans un environnement ravagé par la guerre.
Au moment où les soldats entendent le cri du nourrisson, le chaos se suspend brièvement — moment bouleversant, capturé en un seul souffle.
Le plan séquence met en valeur la portée symbolique de ce bébé dans un monde stérile : la vie comme miracle, même au milieu de la mort.
Soutenir la cohérence du point de vue
Le plan suit principalement Theo, maintenant ainsi une subjectivité constante.
Le spectateur ne sait que ce que Theo sait, ne voit que ce qu’il voit. Cela renforce l'identification émotionnelle avec lui.
Exploiter la contrainte technique comme langage cinématographique
Cette séquence a été longuement chorégraphiée et tournée dans des conditions extrêmes, mêlant explosions réelles, figurants, véhicules, et décors urbains partiellement détruits.
Un fait célèbre : une éclaboussure de sang touche la lentille, et Alfonso Cuarón a choisi de conserver l’imperfection, ce qui amplifie l’effet de réalisme.
L’envers du décor :
Un décor réel et modifiable
La scène a été tournée en décor naturel, dans un camp de réfugiés reconstitué, puis détruit partiellement pour simuler la guerre.
Les explosions, impacts de balles et débris ont été contrôlés en temps réel, nécessitant une coordination millimétrée entre les figurants, les effets spéciaux et la caméra.
Un système de caméra sur mesure
Dans les scènes de combat urbain à pied, la caméra était parfois fixée à un rig complexe mobile (inspiré de la Steadicam), ou déplacée sur des rails dissimulés, via des grues suspendues.
Trucages numériques invisibles
Bien que présenté comme un plan séquence unique, quelques transitions numériques subtiles ont été utilisées pour masquer des coupes (ex. : en passant à travers un mur sombre ou un nuage de poussière).
L’un des moments les plus célèbres : la tache de sang sur l’objectif (vers 4:45), qui aurait dû justifier une coupe, mais que Cuarón a conservée car le reste du plan était parfait.
Chorégraphie avec les figurants et effets pratiques
Plus de 150 figurants étaient impliqués dans cette scène, chacun synchro avec les actions de Theo, les explosions et les mouvements de caméra.
Chaque explosion ou tir devait être synchronisé à la seconde, sans possibilité de retakes faciles.
TÉMOIGNAGE DE L’ÉQUIPE
Alfonso Cuarón a déclaré que c’était l’un des plans les plus complexes de sa carrière.
Emmanuel Lubezki (chef op') : « Ce n’est pas juste de la technique. C’est une manière de raconter l’histoire à travers la durée. »
La scène a parfois nécessité des jours entiers de répétitions, et si un seul élément échouait, il fallait tout recommencer.
HÉRITAGE TECHNIQUE
Ce plan séquence a influencé de nombreux cinéastes contemporains (notamment Sam Mendes avec 1917) et est étudié dans les écoles de cinéma comme un modèle de narration immersive par la mise en scène.
Durée du plan séquence :
près de 6 minutes.